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"Denise Jardinière vous invite chez elle" : le seul-en-scène "camp" fête ses 10 ans

Voilà dix ans que Denise Jardinière vous invite chez elle, incroyable seul-en-scène camp aux allures clownesques, est interprété par le comédien Thibaut Boidin. têtu· l’a rencontré.

C’est l’histoire d’une femme prénommée Denise qui, visiblement, adore jardiner. Elle reçoit chez elle dans une ambiance a priori chaleureuse, notamment grâce au papier d’Arménie qui embaume la pièce. Forcément, vu le standing de l’hôtesse de maison, c’est sa gouvernante qui accueille les premiers invités, les place, les fait patienter… C’est que Denise se fait attendre.

“Beaucoup de gens viennent sans rien savoir, la plupart du temps par recommandation d’amis qui leur disent : ‘Il faut aller voir Denise Jardinière, mais je ne te dis rien !’ J’aime bien cette idée“, explique le comédien Thibaut Boidin. Nous n’en dirons donc pas plus, sinon que son aventure ne se déroulera évidemment pas comme prévu. Et aussi que nous avons été littéralement fascinés par sa proposition, nous qui ne savions pas grand-chose non plus avant d’entrer dans la salle.

Seul en scène, Thibaut Boidin – qui, pour la petite histoire, est aussi à l’affiche depuis dix-huit ans dans le rôle-titre du spectacle musical Peter Pan – parvient à tenir les spectateurs et spectatrices en tension durant une heure quinze. Tout repose sur lui, sur son savoir-faire, qu’il a appris il y a 20 ans auprès d’un grand nom : le mime Marceau. “Je viens vraiment du théâtre du corps. J’ai eu Marcel Marceau comme prof pendant deux ans. Avec lui, on travaillait au millimètre la gestuelle, chaque mouvement. Ça forme !” se souvient-il. 

D’où, deux décennies plus tard, son Denise Jardinière d’une grande précision qui, bonne surprise, transpire le camp par tous ses pores. Dans l’interview qui suit, Thibaut Boidin cite ainsi certaines des références queers qui l’ont amené à créer son personnage féminin, qu’on aurait par exemple pu croiser au détour d’un couloir du château du Rocky Horror Picture Show ou dans un film de John Waters. Une clé de lecture communautaire assez délicieuse qui ajoute un soupçon d’ironie mordante à son spectacle très grand public – il y a même parfois des enfants dans la salle !

 

têtu· : Comment est né le personnage que l’on découvre dans le spectacle ?

Thibaut Boidin : Au départ, je voulais interpréter un personnage loin de moi, mais, finalement, de tous ceux que j’ai interprétés, c’est sans doute celui dont je suis le plus proche ! Certes, l’histoire racontée sur scène n’est pas la mienne, mais je me suis inspiré de mes propres drames, de ma solitude, pour la construire. Pour résumer, Denise Jardinière, c’est véritablement mon clown ; moi poussé à l’extrême, dans tous mes tics, mes réflexes, mes failles… Je me sers du masque pour me sentir libre, un peu comme le font les drag-queens – même si, ici, on est au théâtre, il y a quelque chose de similaire dans le fait de se servir d’un masque pour gagner en liberté.

 

Quelles références personnelles avez-vous apportées au personnage ?

Depuis ma petite enfance, je baigne dans le bizarre, l’étrange… J’ai, par exemple, été complètement envoûté par les premiers clips de Mylène Farmer. J’avais huit ans quand est sorti Sans contrefaçon, et ça a été pour moi un véritable choc. Je n’avais pas de magnétoscope, je guettais les passages à la télévision ! C’est ce genre de choses qui m’a toujours attiré. David Bowie, pareil. J’ai, très jeune, été fasciné par sa musique, mais aussi par ses films, son iconographie, ses personnages… Plus tard, j’ai aussi beaucoup lu de littérature japonaise, où il y a un vrai décalage dans l’interprétation des choses, dans les sensations, avec des petits riens, intimes et poétiques. Et puis je vais voir absolument tous les films d’horreur qui passent au cinéma : ce sont souvent des métaphores qui utilisent l’angoisse pour raconter autre chose. Un peu comme le spectacle.

 

Comment le spectacle a-t-il vu le jour ?

Très rapidement, en quelques semaines, puisque je l’ai écrit en décembre 2011, et la première a eu lieu en janvier 2012, devant treize personnes ! À l’époque, j’avais envie de faire un spectacle intime, de rencontrer les gens, d’être dans une forme de proximité. J’ai donc commencé à le jouer chez moi, sans penser qu’un jour il sortirait de mon appartement. Je donnais rendez-vous au public par Facebook, j’envoyais mon adresse, le digicode, puis les gens frappaient à ma porte. Lorsque j’ouvrais, déjà dans le personnage de la gouvernante, je les installais, et l’histoire commençait.

 

Et comment a-t-il grandi au fil des ans ?

J’ai fait soixante représentations chez moi, et je pensais vraiment m’arrêter mais, chaque fois, les gens me demandaient de continuer pour montrer le spectacle à telle ou telle personne. C’est vraiment le bouche-à-oreille qui a fait que le spectacle a continué ! Puis, un soir, une directrice de théâtre est venue et m’a convaincu de venir jouer dans son tout petit théâtre – Les Blondes Ogresses à Paris, dans le 18e. J’ai fait quatre saisons là-bas, ce qui a permis d’installer le spectacle. Ensuite, en 2017, j’ai fêté les cinq ans à Bobino, devant une jauge importante de 450 personnes. Je ne pensais pas que ça pourrait fonctionner dans une grande salle, mais ça a marché. De là, j’ai dit OK à la prod pour aller partout, aussi bien dans les théâtres de poche que dans les grandes salles.

 

Depuis, votre spectacle tourne avec succès. Imaginez-vous le jouer encore longtemps ? Ou le transmettre à un moment à un autre interprète ?

Pour l’instant, je continue à le jouer avec plaisir, et je ne suis pas encore rassasié. En revanche, le faire jouer par quelqu’un d’autre, là, non, ça n’arrivera jamais, parce que c’est trop intime, trop personnel. Mais, si cinquante ans après ma mort, quelqu’un a envie de le reprendre, je ne pourrai rien dire !

Denise Jardinière vous invite chez elle, tous les mercredis soir au Grand Point-Virgule à Paris jusqu’au 28 décembre, mais aussi en tournée dans toute la France : Montauban, Bayonne, Caen, Rouen, Vannes, Aix-en-Provence, Lyon… Toutes les dates sont disponibles sur le site de Birdy Prod ou sur le Facebook du spectacle.

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